Homélie du lundi 30 novembre 2020 en la cathédrale d’Embrun, fête de saint André
Notre désormais célèbre jésuite Embrunais Pierre Jartoux est donc mort à Pékin le 30 novembre 2020.
Une date qui plait bien au clergé actuel de l’Embrunais, puisqu’il y a 3 André prêtres ici ! Une date qui fut sans doute un signe de Dieu pour rappeler à lui ce grand missionnaire haut-alpin.
D’abord notons son nom : André, ce n’est pas un nom hébreux, mais grec, qui montre pourrait-on dire l’ouverture d’esprit des parents de Pierre et André.
L’évangile de leurs vocation nous dit quelques chose de toute vocation sacerdotale :
– Jésus vit les 2 frères, sans doute parmi d’autres au bord de la mer de Galilée. Être vu par Jésus. Beaucoup dans l’évangile, et aujourd’hui en font l’expérience.
– Puis c’est l’appel : Venez à ma suite. Être prêtre c’est bien marcher à la suite du Christ. Être Chrétien, c’est bien cela aussi, à tel point que le pape François propose le titre de Disciples missionnaires.
– et enfin la mission : je vous ferai pécheur d’homme, avec ce jeu de mot bien compréhensible, et qui profondément nous dit le respect de Dieu pour chacun, qui nous appelle avec nos talents, nos charismes.
La réponse fut rapide : « Aussitôt, laissant leur filets ils le suivirent. » Pierre Jartoux a vécu cet appel de Dieu, et cet envoi en mission, au loin. Et à l’époque, quand on partait, on était certain de ne pas revenir.
Pierre Jartoux a été envoyé en Chine comme scientifique, cartographe et horloger, mais avant tout il est un jésuite missionnaire. Il l’écrit dans une lettre retrouvée à l’occasion du colloque d’août dernier : « Notre Église n’est pas encore peinte […], mais nous espérons qu’elle le sera dans moins d’un an et alors nous aurons occasion d’annoncer Jésus-Christ à tout Pékin, et de donner une connaissance du vrai Dieu suffisante pour rendre Pékin inexcusable s’il n’embrasse notre Religion. » Cette fougue évangélisatrice a posé les bases de la communauté chrétienne chinoise. La mission d’annonce de la bonne nouvelle de l’Évangile demeure au cœur de la vie chrétienne.
Cette bonne nouvelle, c’est le kérygme rappelé par saint Paul : « Frère, si de ta bouche tu affirmes que Jésus est Seigneur, si dans ton cœur, tu crois que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, alors tu seras sauvé. »
C’est cette bonne nouvelle d’un Dieu qui vient nous sauver que nous nous préparons à vivre à Noël par ces 4 semaines de l’Avent.
C’est pour cette bonne nouvelle que Dieu continue à appeler pour la mission, des baptisés comme laïcs et d’autres comme prêtres et religieuses. Je ne sais si Pierre Jartoux mériterait d’être canonisé, mais je suis certains que s’il est au Ciel près du Seigneur, il doit intercéder pour son pays de naissance, pour son Embrunais. Que d’autres missionnaires, d’autres prêtres se lèvent parmi la jeunesse.
Amen
Mot de Mgr Xavier Malle à l’occasion du dévoilement de la plaque
Salutation aux autorités : Madame le maire, son adjointe à la culture et les autres élus.
Un enfant d’Embrun, Pierre Jartoux, après avoir suivi sa scolarité au collège jésuite, est entré dans la Compagnie de Jésus. Prêtre, il a ensuite été envoyé en Chine par le roi Louis xiv, au titre de scientifique et participa à une aventure incroyable. Il est mort à Pékin en 1720, et est enterré à quelques tombes du célèbre Matteo Ricci.
Il est heureux que le diocèse de Gap, accompagné par de nombreux partenaires que je remercie ait pu organiser un jubilé pour les 300 ans de sa mort… malgré les difficultés d’une pandémie, la Covid-19, venue de Chine et marquant cette année 2020. L’académicien François Cheng, qui âgé de 90 ans n’a pu nous rejoindre, nous a écrit une carte d’encouragement : « La noble figure du Père Jartoux mérite amplement d’être célébrée, et à travers lui, le thème de la rencontre des cultures ». L’ouverture sur le monde a ainsi marqué tout le diocèse de Gap et Embrun, par une exposition itinérante dans les villes des Hautes-Alpes sur Mattéo Ricci et sur Pierre Jartoux, par un colloque scientifique qui s’est tenu ici-même le 8 aout dernier et dont les actes seront publiés par le diocèse de Gap et par la Société d’Etude des Hautes-Alpes, et enfin nous voulions associer les élèves de chinois du collège-lycée catholique Saint-Joseph de Gap. Ils auraient dû passer cette journée entière avec nous ici à Embrun, mais la prudence sanitaire l’a empêché. Mais le jubilé Jartoux est allé dans l’enceinte du collège par l’exposition et par des conférences. Nous pourrions penser que la mondialisation est l’œuvre des dernières générations, mais cette aventure chinoise d’un jeune Embrunais montre qu’il n’en est rien. Cette plongée dans l’histoire nous permet de connaître nos racines. Le pape François, dans une lettre sur l’Europe, écrit : « À l’Europe je voudrais donc dire : toi, qui as été au cours des siècles un foyer d’idéaux et qui sembles maintenant perdre ton élan, ne t’arrête pas à regarder ton passé comme un album de souvenirs. […] Europe, retrouve-toi toi-même ! Retrouve donc tes idéaux qui ont des racines profondes. Sois toi-même ! N’aie pas peur de ton histoire millénaire qui est une fenêtre sur l’avenir plus que sur le passé. »
Cette plaque commémorative en bronze posée sur l’ancien collège jésuite rappelle depuis le 30 novembre 2020 cette glorieuse histoire aux générations futures.
L’histoire, dit le Pape François, est une fenêtre sur l’avenir. Le même invite les chrétiens à être des disciples missionnaires du Christ Jésus. Jésuite et scientifique, le père Jartoux était avant tout un missionnaire.
On peut estimer que ce jubilé Jartoux a été bénéfique pour chacun, pour notre culture, pour notre ouverture sur l’Orient mystérieux, et pour nous oxygéner en pleine pandémie !
Merci Monseigneur d’avoir aussi « gravé » dans les cœurs et dans les têtes ce qui l’est maintenant dans le bronze. Que votre message vienne éclairer notre époque et fasse renaître l’espérance à l’image de ce que nous ont laissé ces ancêtres missionnaires.