«Je sollicite la grâce de faire profession perpétuelle.»
Est-ce qu’il est juste, est-ce qu’il est possible de nos jours, de poser un acte définitif, de s’engager pour la vie ?
C’est la question ô combien importante qui nous est posée aujourd’hui par les vœux perpétuels de sœur Jacky et par la Parole de Dieu que nous venons d’entendre. Vous comprenez combien cette question est importante pour chacun d’entre nous, quelque soit notre état de vie. Pour ne pas vous laisser languir, voici la réponse que Jésus nous donne : « Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas ! » Autrement dit, oui c’est possible, oui c’est juste, car c’est Dieu qui unit.
Commençons par l’évangile de ce 27e dimanche que nous avons gardé, tout comme la seconde lecture. Par contre nous nous sommes permis de changer la première lecture pour prendre un passage de la prophétie d’Isaïe que sœur Jacky a pris comme devise personnelle. Cet évangile fait partie des textes que nous étudions souvent avec les fiancés qui se préparent au mariage. Il nous parle de fidélité, valeur commune au mariage et à la consécration religieuse. Du temps de Thérèse de Lisieux, pour marquer cette valeur commune, la jeune carmélite qui entrait dans la vie religieuse portait une robe de mariée. Les femmes qui se marient n’étaient donc pas les seules à aller à l’autel avec de belles robes blanches et une longue traîne. Les religieuses aussi. La seule différence c’est qu’arrivées à l’autel, le prêtre remettait à ces jeunes femmes la robe et le voile qui constitueront la tenue de la congrégation qu’elles devront porter toute la vie. Si la congrégation des sœurs de Notre-Dame de la Salette n’a plus cette coutume pour l’entrée dans la vie religieuse, vous verrez que le rite des vœux solennels prévoit toujours la remise d’une alliance. Mariage ou consécration religieuse, il y est bien question de don de soi et de fidélité.
Dans l’évangile, les pharisiens essaient de coincer Notre Seigneur Jésus sur le mariage : « Est-il permis à un mari de renvoyer sa femme ? » Ils connaissent bien sûr la réponse à leur question, ce que Jésus leur fait remarquer : « Moïse a permis de renvoyer sa femme à condition d’établir un acte de répudiation. » Mais Jésus en profite pour mettre la barre plus haute : « C’est en raison de la dureté de vos cœurs qu’il a formulé pour vous cette règle. Mais, au commencement de la création, il n’en était pas ainsi. » Il est exact, et nous pouvons nous-même l’expérimenter, depuis le péché originel, les relations humaines et particulièrement les relations hommes-femmes sont troublées. Or Jésus est venu nous sauver du péché originel, restaurer nos relations humaines, nous rétablir dans le plan de Dieu et nous redonner cette capacité de don total de nous-même.
Ce don total est dans notre nature humaine ; Jésus le rappelle : « Dieu les fit homme et femme. À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux deviendront une seule chair. Ainsi, ils ne sont plus deux, mais une seule chair. » Le mariage durable est bien dans le plan de Dieu. Et donc logiquement il est dans notre désir profond. Qui n’a pas désiré rencontrer le grand amour de sa vie. Pour que cet amour soit total, il doit être pour la vie et exclusif. Le Pape dans son exhortation sur la famille Amoris Laetitia nous dit que : « dans la nature même de l’amour conjugal il y a l’ouverture au définitif » (AL 123). Alors oui il est béni par Dieu : « ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas ! »
Nous étions dans l’évangile de saint Marc. Me revient alors que saint Matthieu au chapitre 19 nous offre une parole supplémentaire des apôtres après ce même passage : « Si telle est la situation de l’homme par rapport à sa femme, mieux vaut ne pas se marier. » C’est à dire, si on ne peut pas être infidèle, autant ne pas se lier les mains. Parfois on entend : je reste avec lui ou avec elle, tant que cela marche. Les médias parlent de l’amour Kleenex : fort, doux mais jetable. Que de souffrances ! Jésus reconnaît que ce n’est pas facile à comprendre : « Tous ne comprennent pas cette parole, mais seulement ceux à qui cela est donné. »
Frères et sœurs, il est important de réentendre cette parole du Fils de Dieu, car vous connaissez la plus grande épidémie mondiale actuelle : l’infidélité. Le pape souligne la nécessaire « transformation de l’amour » car je cite, « la prolongation de la vie conduit à quelque chose qui n’était pas fréquent à d’autres époques : la relation intime et l’appartenance réciproque doivent se conserver durant quatre, cinq ou six décennies, et cela se convertit en une nécessité de se choisir réciproquement sans cesse » (AL 163).
Chères religieuses, n’est-ce pas valable également pour vous ? La nécessité de re-choisir sans cesse votre époux, Jésus et votre communauté ?
J’étais cette semaine à Lourdes avec le pèlerinage diocésain. Alors que j’étais en train de prier mon chapelet à la grotte, passe devant moi une très jolie jeune fille en fauteuil roulant. Elle fait le tour de la grotte dans son fauteuil électrique, humble et rayonnante. Quelle fut ma surprise en apprenant depuis que d’ici 10 jours, elle entrait dans un monastère de la Visitation. C’était Jeanne Pelat, malade de myopathie, 21 ans, marraine du Téléthon en 2004. Étudiante en journalisme, histoire de l’art et théologie, elle s’est livrée à La voix du Nord : « « Ne vous inquiétez pas pour moi, je serai la plus heureuse du monde…Oui, j’ai eu une vie sociale et affective riche. […] J’étais très heureuse et pourtant pas pleinement comblée, il me manquait cette touche d’absolu. Dans cette vie de religieuse, de silence, je sens que je serai à ma place, épanouie, dans un bonheur franc et non pas un bonheur plat ».
Elle explique qu’elle n’a pas fait ce choix par défaut, mais qu’il s’agit d’une réponse à un « appel mystérieux », qu’elle compare à un « coup de foudre en mille fois plus fort ».
Un coup de foudre avec Jésus.
Saint Jean-Paul II dans son magnifique texte sur la vie consacrée Vita consecrata l’exprime ainsi (VC 14) : « Le fondement évangélique de la vie consacrée est à chercher dans le rapport spécial que Jésus, au cours de son existence terrestre, établit avec certains de ses disciples, qu’il invita non seulement à accueillir le Royaume de Dieu dans leur vie, mais aussi à mettre leur existence au service de cette cause, en quittant tout et en imitant de près sa forme de vie. Cette existence « christiforme », proposée à tant de baptisés au long de l’histoire, ne peut être vécue que sur la base d’une vocation spéciale et en vertu d’un don particulier de l’Esprit. En elle, la consécration baptismale est amenée à donner une réponse radicale par la sequela Christi, grâce à la pratique des conseils évangéliques» fin de citation.
Alors nous pouvons accueillir notre première lecture, une prophétie d’Isaïe : « ainsi parle le Seigneur, lui qui t’a créé, Jacob, et t’a façonné, Israël : Ne crains pas, car je t’ai racheté, je t’ai appelé par ton nom, tu es à moi. »
Frères et sœurs, Sœur Jacky a entendu cet appel de Dieu, a eu ce coup de foudre ; et veut y répondre de tout son cœur.
Dieu a entendu aussi son oui, et va maintenant la consacrer.
Il nous redit à nous : Ce que Dieu va unir, que l’homme ne le sépare pas ! Au contraire, voulez vous honorer notre sœur comme une consacrée du Seigneur ? Ce matin, Jésus redit à sœur Jacky : « Ne crains pas, car je suis avec toi. »
Dieu aujourd’hui encore appelle des hommes et des femmes à le suivre. Nous lui rendons grâce ! Nous lui demandons d’autres vocations et ce parmi les jeunes hauts-alpins.
Pour favoriser leur écoute, le 17 octobre, à l’occasion du pèlerinage du séminaire d’Aix pour la saint Luc, son saint Patron, je vais bénir au sanctuaire Notre-Dame du Laus une nouvelle chapelle, une chapelle de prière pour les vocations. C’est le sas d’entrée de la Chapelle des anges par l’extérieur. L’idée est née l’an passé. Lors de l’ordination de 3 diacres permanents j’avais annoncé mon désir de faire brûler deux neuvaines au Laus : une pour les vocations sacerdotales et une pour les vocations religieuses. Notre sœur sacristine du Laus a fini par découvrir l’emplacement idéal: dans ce lieu de passage, il y a une statue de sainte Thérèse de l’enfant Jésus et une du curé d’Ars. Voilà deux intercesseurs pour les vocations. Nous allons y mettre en grand les deux prières pour les vocations, celle des adultes pour les jeunes et celle des jeunes pour leur propre vocation; et nous venons de recevoir une relique de la sainte de Lisieux.
Frères et sœurs, j’ai donc la joie de vous inviter à un pèlerinage pour les vocations au Laus le 17 octobre pour la bénédiction de cette chapelle. Vous pourrez aussi y confier le cheminement de prêtres et de religieuses de vos connaissances.
Je termine bien sûr avec Notre-Dame du Rosaire que l’Église célèbre aujourd’hui. Chères sœurs, plus vous serez fidèles à la prière du Rosaire, du chapelet, plus vous serez configurées au Christ, car dans le chapelet vous contemplez jour après jour votre époux. Il est avec vous.