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Une messe chrismale pleine d’émotion contenue

Mardi 11 avril 2017, Mgr Jean-Michel di Falco Léandri a présidé sa dernière messe chrismale en la cathédrale d’Embrun.

La nouvelle de la nomination de son successeur ayant été rendue publique juste avant l’entrée dans la Semaine Sainte, toutes les personnes présentes savaient bien que cette messe annuelle si particulière « où le peuple de Dieu dans toute sa diversité se trouve rassemblée » comme l’a dit Mgr Jean-Michel di Falco Léandri, n’allait pas ressembler aux précédentes.

Et de fait, même si Mgr Jean-Michel di Falco Léandri a bien précisé dans son homélie que ce n’était pas « une homélie d’adieu », la ferveur était là durant toute la célébration, l’émotion prégnante, avec ici et là une pointe d’humour bienvenue.

À la sortie, on pouvait entendre les uns et les autres évoquer l’atmosphère familiale qui s’était dégagée de la célébration. Une atmosphère familiale fruit peut-être de la manière dont Mgr Jean-Michel di Falco Léandri a conduit le diocèse durant ses 14 années de présence dans les Hautes-Alpes.

Ci-dessous divers moments de la célébration et le texte de l’homélie.

À noter qu’à l’occasion de cette messe chrismale a été rendue publique la nomination –actée au dernier conseil épiscopal en mars − du père Damien de Beaumont comme curé des paroisses de la Guisane (Saint-Chaffrey, Chantemerle, Le Monêtier-les-Bains, Le Casset, Les Guibertes, Le Lauzet, La Salle-les-Alpes, Le Bez).



 Homélie
de Mgr Jean-Michel di Falco Léandri
Administrateur apostolique du diocèse de Gap et d’Embrun

Voici le début de l’homélie que j’avais préparé il y a quelques jours avant l’annonce de la nomination de mon successeur. J’écrivais ceci :

« Lors de la messe chrismale de l’année dernière je vous avais, en quelque sorte, fait mes adieux pensant que l’arrivée de mon successeur ne saurait tarder. On peut dire qu’il a vraiment tardé mais qu’il n’a jamais été si proche d’arriver. Alors j’invite les pressés de me voir laisser la place à faire preuve de patience. Quant à ceux qui regrettent mon départ, il y en a tout de même quelques-uns je pense, je les invite à consoler les impatients. À tous je demande de prier pour mon successeur et un peu pour moi ! »

Mais depuis, la nomination du père Xavier Malle a été annoncée. Et je vous demande avec encore plus d’insistance de prier pour lui. Il sera ordonné évêque le dimanche 11 juin en la cathédrale de Gap. D’ici là, le pape m’a chargé d’administrer le diocèse, avec mes vicaires généraux que j’ai reconduit dans leurs fonctions.

Cette homélie n’est pas une homélie d’adieu. J’aurai l’occasion de célébrer le 1er mai au Laus en action de grâce pour ces années d’épiscopat passées au milieu de vous. Et vous êtes bien sûr toutes et tous invités. Cependant, une messe chrismale étant une messe où le peuple de Dieu dans toute sa diversité se trouve rassemblée, je ne peux pas ne pas penser aux quatorze années écoulées au milieu de vous. Défilent devant moi les visages de personnes qui ont été mes collaborateurs et collaboratrices durant un temps et qui sont partis mettre leur compétence et leur dévouement au service d’autres œuvres. Mais aussi les visages de prêtres, de religieux, religieuses, de laïcs, qui sont entrés dans la maison du Père.

Vous, chers prêtres, diacres, religieux, religieuses, pendant toutes ces années passées avec vous j’ai pu observer la manière dont vous avez accompli votre mission dans une Église qui doit faire face au manque de prêtres. Vous êtes présents au milieu de vos communautés avec courage et dévouement. Vous vous donnez sans compter dans une société qui doute souvent de l’utilité de notre présence. Et merci aux laïcs qui sont à vos côtés.

Ce soir je veux vous dire merci. Merci à ceux d’entre vous originaires des Hautes-Alpes. Merci aussi à ceux qui sont venus d’autres régions de France et de plus loin encore, d’Afrique, de Madagascar, du Vietnam, de Belgique, pour rejoindre le diocèse. Et merci à ceux que j’ai eu la joie d’ordonner prêtre.

C’est vraiment pour vous que j’ai été évêque, et c’est avec vous que j’ai cherché à être un peu plus et un peu mieux chrétien. Et si je le suis devenu un peu plus – mais c’est à vous d’en juger – eh bien c’est grâce à vous.

En préparant ce que je souhaitais vous dire ce soir, en sachant, quand j’ai préparé cette homélie, qu’elle serait cette fois vraiment celle de ma dernière messe chrismale, j’ai eu la curiosité d’aller relire l’homélie que j’avais prononcée lors de mon accueil dans le diocèse le 29 novembre 2003.

J’avais notamment évoqué le passé de notre diocèse. Dans ce passé, des hommes et des femmes, des missionnaires, ont parcouru les routes et les chemins de ce département des Hautes-Alpes. Les nombreuses petites chapelles que l’on découvre au creux d’un rocher, au fond d’un vallon, les croix que l’on remarque au sommet des montagnes, aux carrefours des chemins, en sont le témoignage.

Mais que disaient ces missionnaires ? Que prêchaient-ils ? C’est tout simple. Ils indiquaient à leur auditoire le chemin de la sainteté. Ce faisant, ils annonçaient, à ceux qui voulaient bien les entendre, ce qu’est la vocation d’un chrétien. Et cette vocation, c’est la sainteté.

Certes, vaste programme ! Facile à réaliser en apparence malgré le petit nombre de ceux qui seuls y parviennent.

Être un saint, c’est être totalement humain, totalement femme, totalement homme. Oh, pas n’importe comment ! Être ce que nous sommes dans la pensée de Dieu. Et c’est répondre à ce pour quoi nous sommes nés.

Vous m’avez souvent entendu comparer les communautés chrétiennes à un orchestre symphonique. Il est composé d’instruments de plusieurs sortes, et les partitions sont différentes : celles du cor ou des percussions ne ressemblent en rien à celles du triangle ou des clochettes, ou des violons ou des violoncelles. Instruments divers, partitions multiples, mais tous au service d’une œuvre commune. Pour nous, chrétiens, c’est vivre de l’Évangile et le proclamer.

Il n’existe pas de modèle unique que l’on pourrait prétendre imposer à tous pour vivre sa foi ! C’est cette diversité qui fait la richesse spirituelle de l’Église.

Nous le savons, une assemblée de chrétiens n’est pas le regroupement  de personnes se jugeant parfaites, mais une assemblée de pécheurs appelés à la sainteté.
Nous sommes les uns et les autres des saints et des saintes en puissance.
Être saint, c’est être disponible à l’Esprit, c’est se laisser guider, se laisser habiter, se laisser convertir par l’Esprit.
Il ne s’agit pas d’accomplir des actions extraordinaires, mais bien d’être tel que Dieu nous veut, là où il nous veut : un homme, une femme fait pour aimer, aimer comme Dieu aime. Aimer comme le Christ nous a aimés jusqu’au don de sa vie.

Quelle qu’ait pu être notre vie jusqu’à ce jour, la sainteté reste accessible.
Personne n’est définitivement enfermé dans son passé, seuls en restent prisonniers ceux qui ont perdu toute espérance !

Alors vivre en chrétien aujourd’hui, dans ce monde-là, qui est notre monde, n’est-ce pas un peu révolutionnaire ? Vivre en chrétien, c’est aller contre le courant par lequel on a la tentation de se laisser porter. Être chrétien, ce n’est pas vivre dans un ghetto, un monde imaginaire, aseptisé, un monde tel que nous aimerions qu’il soit. L’Église n’est pas une Bastille dans laquelle nous rechercherions refuge. Les portes de nos cénacles sont pulvérisées par la force de l’Esprit, et à l’exemple de saint Pierre nous sommes poussés vers les autres pour partager l’Espérance qui nous fait vivre.

Lors de la Transfiguration, la tentation est grande pour les apôtres, qui accompagnent Jésus, de rester en haut de la montagne en sa compagnie avec Moïse et Élie. Et Pierre propose même de dresser trois tentes. On est si bien ensemble !… Mais le Christ les invite à redescendre de la montagne pour rejoindre les autres, car c’est vers eux qu’il faut aller. C’est, d’une certaine manière, ce que le pape François appelle les périphéries.

Alors oui, être en chemin vers la sainteté, c’est poursuivre l’œuvre du Christ.
Nous voulons plus d’amour dans le monde ? Le Christ a besoin de nous !
Nous voulons plus de justice ? Le Christ a besoin de nous !
Nous voulons plus d’attention aux autres ? Le Christ a besoin de nous !
Nous voulons plus de partage ? Le Christ a besoin de nous !
Le Christ à besoin de nous, car nous sommes le regard du Christ, nous sommes les mains du Christ, nous sommes sa voix, son sourire, son cœur !

Lui-même nous a appris qu’il ne fallait jamais renoncer, jamais capituler, ni devant la violence, ni devant la haine, ni devant l’injustice, ni même devant la mort. Pour le Christ et pour les chrétiens, la mort n’est pas le dernier mot de notre existence. C’est l’amour qui est le dernier mot, la foi et la confiance dont le Christ fut le témoin jusque dans ses souffrances et dans sa mort.

Dans cette homélie de 2003 je disais aussi : « Au cours de mes séjours successifs, j’ai écouté, j’ai observé et à chaque fois mon cœur s’est empli d’espérance à la pensée des pages qui viendront s’ajouter à celles de l’histoire de notre diocèse et que, sous la conduite du Christ, nous écrirons ensemble. » Ces pages sont désormais écrites, à chacun de les relire s’il le veut, seul le Seigneur saura juger ce qu’elles valent.

Nous avons la chance d’avoir sur notre diocèse le sanctuaire de Notre-Dame du Laus. Que dis-je « chance », le privilège ! Ce lieu sacré, je disais il y a quelques années qu’il était le poumon de notre diocèse. Il en est aussi le cœur. Je sais que nombreux sont ceux qui voudraient voir béatifier un jour celle à qui nous devons ce privilège : Benoîte Rencurel. Sur ce point, faisons confiance à la sagesse de l’Église. Mais demandons à la Vierge Marie que nous honorons au Laus que chaque pulsation de ce cœur vienne irriguer, ressourcer, chacun des plus petits vaisseaux comme chacune des veines et des plus grosses artères qui donnent vie au corps ecclésial de notre diocèse.

Aujourd’hui, on présente trop souvent l’Église comme une vieille dame qui juge et qui condamne, le pape François nous invite à donner le témoignage d’une Église qui aime et qui pardonne.

Alors, catholiques des Hautes-Alpes, au nom même de notre baptême, je vous le demande, à l’exemple du premier « oui » de Marie au jour de l’Annonciation, soyons les témoins d’une Église dont la devise serait « fiat » ! Soyons les témoins d’une Église qui dit « oui » ! Oui à la vie ! Oui à l’amour ! Oui aux pauvres ! Oui aux blessés de la vie ! Une Église qui ouvre ses bras et qui rejette l’exclusion ! Une Église qui, par les sacrements et tout particulièrement l’Eucharistie, nous donne la force de dire « oui » à notre vocation d’homme et de femme.
Oui, nous aimons ce monde ! Oui, nous voulons être acteurs à part entière de la société dans laquelle nous vivons. Être catholique ne signifie pas être citoyen de seconde catégorie.
Oui, nous voulons, comme nous invitait le pape Jean-Paul II, construire la civilisation de l’amour !
Le seul « non » que nous pouvons dire, que nous devons dire : c’est non à la résignation.
Alors si Dieu le veut, nous pourrons accomplir ce miracle dont parle Georges Bernanos dans le Journal d’un curé de campagne : « Le miracle de nos mains vides. »

+ Jean-Michel di FALCO LÉANDRI
Administrateur apostolique
du diocèse de Gap et d’Embrun

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Cet article a été rédigé par le service communication du diocèse de Gap.

Cet article a 3 commentaires

  1. croassant

    Monseigneur, merci pour tout ce partage, mais que d’émotion!. Les pages sont désormais écrites et nous pouvons que vous féliciter pour la plénitude de votre épiscopat en union avec les prêtres.
    Un parcours accompli avec l’héroïcité des vertus chrétiennes.
    Bernanos, je complète Monseigneur sa citation:
     » Le miracle des mains vides, mais le coeur plein d’Amour ». Votre auteur préféré et le mien, Mgr Di Falco, le livre « Le Garri » ne me quitte pas.
     » 29 juin 1968, j’étais prêtre! »
    La Vierge Marie, Notre-Dame du Laus, continuera de veiller sur vous et illuminera votre retraite que je suppose encore active et ce lieu sacré nous rapproche.
    Que Dieu vous garde Monseigneur et ne nous abandonne pas!. Qui aime est né de Dieu!

  2. Treboz

    Merci de mettre « en ligne » avec un tel soin, homélies, enseignements, nouvelles de votre diocèse, pour tous ceux qui veulent en prendre connaissance, merci également pour cette belle et généreuse action de partage.

    Toute ma gratitude à Mgr Di Falco et à son équipe active pour tout ce qui a été mis en place pour nous aider à marcher avec l’esprit, même si nous sommes éloignés de votre diocèse. Félicitations, que Dieu vous bénisse et bienvenue à Mgr Malle.
    En union de prière avec vous tous.

  3. grimaldi marie josé

    N’en doutez pas Monseigneur je vais continuer de prier pour vous, je sais que votre nouveau chemin sera aussi lumineux que le précédent …

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