Le Christ, mon espérance, est ressuscité !

Bienvenue sur l’article présentant le message de Pâques 2024 de Mgr Xavier Malle ==) Le texte est disponible en téléchargement Ici !

Le Christ, mon espérance, est ressuscité !

Message de Pâques 2024 de Mgr Xavier Malle, évêque de Gap-Embrun

Chers fidèles catholiques des Hautes-Alpes, chers amis,

dans quelques jours nous allons vivre la joie de Pâques, la joie de la vie qui a vaincu la mort. Jésus était mort, il est vivant. La vie, la souffrance, la mort sont des réalités existentielles vécues par notre Seigneur qui nous affectent personnellement, nous ou nos proches.

L’allongement de la durée de la vie porte aussi ces questions de la fin de la vie, et depuis des années des débats ont lieu dans notre pays sur le sujet. Déjà lors des messes de Noël dernier, l’Église qui est en France priait pour le respect et la protection de la vie, de sa conception à sa fin naturelle : « Que la lumière de Bethléem éclaire nos gouvernants, afin que ceux qui sont chargés d’élaborer et de voter la loi prennent mieux conscience du fait que toute vie est un don pour l’humanité, que toute vie est digne et respectable. »

En raison des annonces officielles précises faites récemment par les autorités de notre pays concernant le suicide assisté et l’euthanasie, il me faut, en cette fête de Pâques, comme votre évêque, à la suite du Saint Père et de la Conférence des Évêques de France, prendre plus clairement la parole sur les projets qui sont lancés. Veuillez me pardonner :  mes mots, qui sont directs, peuvent blesser certains d’entre vous, en fonction de nos expériences personnelles de la fin de la vie et de la souffrance. N’hésitez pas à m’écrire et à venir me rencontrer pour en parler, ou à rencontrer vos curés.

Trois mots « directs » me sont venus en découvrant ce qui est proposé : tromperie, régression et engrenage.

1/ Tromperie

C’est une tromperie d’appeler « loi de fraternité » une loi d’euthanasie et de suicide assisté.

Une tromperie, ce sont les mots de Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des Évêques de France dans sa première réaction aux annonces officielles (1)

Un dévoiement du terme, ce sont les mots utilisés par la Conférence des Évêques de France dans une déclaration du 19 mars 2024,  Ne dévoyons pas la fraternité ! (2)

J’ajoute que c’est aussi une tromperie d’appeler « aide active à mourir AAM », l’euthanasie et le suicide assisté, car d’une part on cache le geste létal, et d’autre part on encourage une non-assistance à personne en danger.

A Marseille en septembre 2023, le pape François s’interrogeait : « Qui écoute les gémissements des personnes âgées isolées qui, au lieu d’être valorisées, sont parquées dans la perspective faussement digne d’une mort douce, en réalité plus salée que les eaux de la mer ? »

Ne faut-il pas une aide active à vivre, et non une aide active à mourir ?

2/ Régression

C’est une régression importante par rapport au modèle français du « bien mourir », qui était un équilibre finement ciselé : ni acharnement thérapeutique ni euthanasie, mais soins palliatifs, auquel il fallait donner les moyens financiers nécessaires. Les annonces me semblent cumuler les pires des modèles : l’euthanasie belge et le suicide assisté suisse.

L’immense majorité des soignants s’élèvent contre le nouveau projet, car l’expérience des soins palliatifs atteste que là où le malade trouve compassion, écoute, soulagement efficace de ses douleurs (les progrès concernant les ‘souffrances réfractaires’ sont importants), la demande d’euthanasie disparaît presque toujours . « Consternation, colère et tristesse des soignants réunis au sein du collectif sur la fin de vie ». (3)

C’est une grave erreur de vouloir mettre dans la même loi euthanasie et soins palliatifs, car la République n’a jamais tenu sa promesse financière de rendre accessible à tous les citoyens les soins palliatifs : 21 départements n’ont aucun service de soins palliatifs. Les Hautes-Alpes, grâce à la clairvoyance et à l’engagement de quelques médecins en sont bien pourvues ; merci à eux.

Les soignants de ces services regardent avec inquiétude ce qui se passe au Québec :  l’euthanasie y est intégrée, comme dans le nouveau projet français, et renverse la culture palliative. L’argent qui devrait être consacré à développer les soins palliatifs part dans l’euthanasie.

Avec vous je suis reconnaissants pour les soignants, les visiteurs de malades et les membres des aumôneries des hôpitaux et Ehpad qui accompagnent les personnes malades ou âgées jusqu’au sommet de leur vie, le passage vers le Ciel.

3/ Engrenage

L’engrenage de ce que saint Jean-Paul II appelait « la culture de mort » tourne de plus en plus vite. Ainsi ces dernières années :

  • Allongement du délai pour avorter de 12 à 14 semaines de grossesse, officiellement pour garantir l’avortement pendant le confinement ; mais avez-vous vu qu’on était revenu en arrière ?
  • Inscription dans la constitution d’une « liberté garantie des femmes de recourir à l’avortement » ; et donc pour la garantir une nouvelle étape risque d’être, à court ou moyen terme, la suppression de la clause de conscience.
  • Et maintenant promotion de l’euthanasie et du suicide assisté.

De plus, alors que les pensées suicidaires ou les tentatives de suicide des jeunes adultes ont fortement augmenté depuis le Covid, la prévention du suicide devrait être une priorité.

L’engrenage va continuer à accélérer. Déjà certains veulent supprimer toute clause de conscience aux soignants, aussi bien pour l’avortement que pour l’euthanasie. La Belgique après avoir mis des garde-fous, a étendu l’euthanasie aux enfants, aux malades psychiatriques et à ceux en grande souffrance psychique, comme l’exemple d’une rescapée d’un attentat et d’un prisonnier.

Les institutions catholiques de soins pourront-elles être des havres où vous serez certains de ne pas être euthanasiés ?

Cet engrenage néfaste était bien perçu par Robert Badinter qui a aboli la peine de mort. Il vient de nous quitter et s’opposait fermement à l’euthanasie : « L’État a-t-il le pouvoir et le droit de dire : « Puisque vous voulez mourir, je vais vous tuer ? »,  « Tout être humain a droit au respect de sa vie, y compris de la part de l’État, surtout en démocratie. »

Après ce sombre tableau, en cette fête de la vie, cette fête de Pâques, je vous invite à agir avec trois verbes pour lutter contre cette culture de mort :

1/ Offrir : en cette année de la prière, offrir vos efforts de ce Carême qui s’achève, de partage, de prière et de jeûne, pour que la vie soit aimée et défendue, de sa conception naturelle à sa fin naturelle. Découvrez une prière pour la vie (4).

2/ Se former : se former en bioéthique pour rendre compte de notre bioéthique inspirée de l’Évangile, et ne pas être déformé par le rouleau compresseur politique et médiatique. Découvrez les conférences de Carême 2023 au Sanctuaire ND du Laus sur la fin de vie (5).

3/ Témoigner : témoigner de la beauté de la vie, même difficile. Être des témoins de l’Espérance, selon le thème du grand jubilé 2025, car la vie l’emportera toujours sur la mort, c’est notre espérance au matin de Pâques. Découvrez le témoignage d’une bénévole en soins palliatifs (6).

Chers frères et sœurs, accompagnons Jésus dans sa Passion, et courons avec Marie Madeleine de grand matin au tombeau : nous constaterons qu’il est vide. « Le Christ, mon espérance, est ressuscité ! Il vous précédera en Galilée. » (Séquence de Pâques)

Mgr Xavier Malle, évêque de Gap-Embrun