Pourquoi se consacrer à la Vierge Marie ?

« Ceux qui l’ont vue [Benoîte] avant qu’elle eut l’honneur de voir la Vierge Marie, et qui la voient après qu’elle a reçu cette céleste grâce, reconnaissent bien qu’il y a quelque chose de surnaturel : (…) Elle est plus modeste, plus simple, plus arrêtée, plus posée ».

Manuscrits du Laus, CA G. p. 11 XI [57]

« Benoîte priait plutôt Marie que Jésus. La Vierge Marie l’avertit qu’elle devait plutôt recourir à Jésus, son très cher Fils, qu’à elle ».

Manuscrits du Laus, CA G. p. 178 X [224] – année 1695

Ces deux passages de l’histoire du Laus illustrent bien le sens de la consécration à la Vierge Marie : se consacrer à Marie ne remplace pas le recours à Jésus, mais permet de se laisser transformer pour vivre davantage des grâces du Christ.

Cet équilibre, Louis-Marie Grignion de Montfort, le grand saint de la dévotion mariale et contemporain de Benoîte Rencurel, l’a exprimé ainsi : « J’avoue, avec toute l’Église, que Marie n’étant qu’une pure créature sortie des mains du Très-Haut, comparée à la Majesté infinie de Dieu, elle est moindre qu’un atome, ou plutôt n’est rien du tout, puisque Lui seul est ‘Celui qui est’ (…) ». C’est donc bien clair : jamais la Vierge Marie n’est mise au même niveau que la Très Sainte Trinité.

Grignion de Montfort poursuit en disant : « Je dis cependant que Dieu ayant voulu commencer et achever ses plus grands ouvrages par la Très Sainte Vierge depuis qu’il l’a formée, il est à croire qu’il ne changera pas de conduite dans les siècles des siècles. [1] » Voilà qui fonde le sens d’une consécration à Marie : Non pas pour négliger l’adoration due au Dieu Trois Fois Saint, mais pour entrer davantage dans Son projet : puisque Fils éternel a voulu passer par Marie pour nous rejoindre, serait-il possible de nous priver d’elle pour Le rejoindre ?

Depuis que nous l’avons reçue pour Mère sur la croix, la Vierge Marie enfante le Christ en nous. Celle qui a donné « forme » au Fils de Dieu dans la chair nous permet ainsi de prendre  la « forme du Christ » dans nos vies. Nous consacrer à Marie, c’est donc la laisser enfanter le Christ en nous, comme elle l’enfanta dans son propre corps.

Ainsi, en se consacrant à Marie, on apprend à ne plus voir la vie chrétienne du côté de l’effort personnel, mais de l’accueil de la Vie plus grande que nous.

Bien sûr que la consécration chrétienne fondamentale, c’est celle que nous avons reçue au jour de notre baptême : plongés dans la mort et la résurrection avec le Christ, nous Lui sommes totalement consacrés par pure grâce, au point de confesser avec saint Paul : « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2,20). C’est la consécration fondamentale de toute notre personne : « Vous ne vous appartenez plus à vous-mêmes, car vous avez été achetés à grand prix » (1 Co 6,19b-20a).

Le père René Laurentin, grand spécialiste de la Vierge Marie, soulignait que la langue anglaise réserve le mot « consécration » au sacrement du baptême et emploie un autre terme pour la consécration mariale : « dedication ». On entend l’idée de « se dédier à ». Mais en français, l’expression n’est pas assez forte pour exprimer combien passer par Marie permet d’actualiser le plus efficacement possible l’unique consécration baptismale qui nous a configurés au Christ.

Si la consécration personnelle à la Vierge Marie rend notre consécration baptismale plus vivante, plus active, qu’en est-il de la consécration d’un diocèse à la Vierge Marie ? C’est d’abord un élan communautaire, l’expérience qu’on n’est pas disciple du Christ tout seul, mais ensemble. Pour un diocèse, la consécration mariale est un appel fervent à recevoir le soutien de la Vierge Marie pour faire grandir l’unité diocésaine : tous enfants de la même Mère, soucieux de la réjouir en vivant une fraternité réelle entre nous.

C’est aussi tous ensemble que les diocésains peuvent chanter : « Marie avec nous, Marie ! »  Pour notre diocèse qui a la grâce d’abriter un sanctuaire d’apparitions mariales et de nombreux autres lieux mariaux, ce renouvellement de la consécration diocésaine est donc autant un témoignage de reconnaissance envers Marie, qu’une supplication pour qu’elle soutienne toute la vie diocésaine dans sa mission d’évangélisation.

Nous consacrer personnellement à la Vierge Marie et lui consacrer un diocèse ou un pays, c’est donc souhaiter entrer davantage dans le grand « oui » qu’elle a exprimé au nom de toute la création.

Un « oui » qui nous transforme, comme Benoîte fut transformée par les rencontre avec la Belle Dame : « Elle est plus modeste, plus simple, plus arrêtée, plus posée », disent les témoins de l’époque. La bergère ressemble ainsi davantage à la Vierge Marie, pour vivre toujours plus de la charité du Christ. Toute donnée à Marie, elle ne vit plus que pour le Christ !

Père Ludovic Frère

Recteur du sanctuaire Notre-Dame du Laus