Ne pensez jamais que vous êtes un fardeau pour les autres – homélie 11 février 2024 Journée mondiale des malades

Dimanche 11 février 2024 – TO6 – Gap-St Roch – Journée des malades et de la santé

« Il criera : “Impur ! Impur !” Tant qu’il gardera cette tache, il sera vraiment impur. C’est pourquoi il habitera à l’écart » Ce lépreux, ce malade de la lèpre, dont l’indice est cette tâche sur la peau, enfreint deux règles sanitaires de ces temps antiques où l’on ne savait pas soigner cette maladie, règles compréhensibles pour éviter de contaminer ceux qu’ils rencontrent. Au lieu de s’éloigner, le lépreux vint auprès de Jésus. Au lieu de crier « impur » il crie : « Si tu le veux, tu peux me purifier. » Jésus lui-même accompli l’impensable, « saisi de compassion, Jésus étendit la main, le toucha », se mettant d’une part en danger d’attraper cette maladie contagieuse, et d’autre part risquant d’être déclaré lui-même impur. C’est ce même geste que certains saints imiteront, tel st François d’Assise qui embrassera un lépreux ou plus proche de nous le père Damien de Veuster, un prêtre missionnaire belge, sur l’Ile de Molokaï à Hawaï, où étaient exilés les lépreux et où il contractera cette terrible maladie et en mourra en 1889. On pense aussi à des soignants engagés dans la lutte contre les maladies contagieuses ; encore dernièrement lors de l’épidémie de la Covid.

« À l’instant même, la lèpre le quitta  et il fut purifié. » C’est un flux de vie qui passe de Jésus à ce malade et non un flux de mort du malade à Jésus. Mais ensuite, avec fermeté, Jésus lui ordonne : « ne dis rien à personne, mais va te montrer au prêtre. » On peut se demander pourquoi après ses miracles, Jésus ordonne de ne pas en parler ? Car il sait que cette publicité entraverait sa mission. Et c’est d’ailleurs ce qui s’est passé ; le lépreux n’ayant pas obéi : « cet homme se mit à proclamer et à répandre la nouvelle, de sorte que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville » « Alors Jésus restait à l’écart, dans des endroits déserts. » Mais l’évangéliste ajoute : « De partout cependant on venait à lui. »

Aujourd’hui, c’est la 32ème journée mondiale de prière pour les malades ; et c’est ce qui se passe.

De partout les malades viennent à Jésus. Et nous, nous portons à Jésus dans notre Eucharistie les malades de notre entourage. Nous intercédons aussi pour tous les médecins, tous les soignants, tous les aidants, tous les aumôniers d’hôpitaux et d’Ehpad, tous les visiteurs de malades. Merci à ceux d’entre vous qui remplissent ces belles missions. Avec vous nous prions : « Si tu le veux, tu peux les guérir. »

En ce lépreux guéri par Jésus les malades qui s’adressent avec confiance à Dieu étaient présents : « Si tu le veux, tu peux me guérir. » « Si tu le veux. » C’est une belle confiance et un total abandon à la Divine Providence ! « Si tu le veux », c’est respecter le plan d’amour de Dieu. Dans nos prières pour demander la guérison, veillons à ne pas tenter de forcer la main de Dieu, ajoutons toujours ce « si tu le veux, que ta volonté soit faite ». A Lourdes ou au Laus, nous invitons les malades à demander leur guérison, mais toujours dans l’abandon et dans la confiance. Tous les malades qui reçoivent l’onction des malades ne sont pas guéris, mais tous reçoivent une grâce de paix et de confiance qui les aide à vivre leur épreuve.

Je profite de ce dimanche des malades pour vous inviter au pèlerinage diocésain à Lourdes début octobre. C’est une expérience d’Eglise extraordinaire, dont témoignent les pèlerins, tels ces lycéens de st Joseph qui reviennent grandis par l’accompagnement des malades. 

A Lourdes, n’ayez pas peur des marchands du temple ; ces commerçants sont au service des pèlerins. Plus profondément, n’ayez pas peur de la maladie en venant à Lourdes. Apprenons à Lourdes à regarder la maladie en face. N’ayons pas peur de toucher un malade, de lui tenir la main. N’ayons pas peur de nous engager dans le SEM, dans l’aumônerie des hôpitaux et des Ehpad. Cette peur de de pas vouloir regarder les grands malades, de ne pas vouloir regarder la mort en face, c’est une des raisons pour lesquelles certains veulent la légalisation de l’euthanasie,

Quelques réflexions sur les projets actuels de légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, car cette semaine le président de la République a reçu les représentants des cultes.

Je les tire d’un tout petit livre de Pierre Jova, « Peut-on programmer la mort ? » aux éditions du Seuil en 2023. Il remarque que l’inquiétude qui motive l’euthanasie est souvent celle de mourir dans la déchéance. Celle aussi de ne plus être autonome. Pour les partisans de l’euthanasie, c’est comme si c’était la pleine possession de ses moyens qui fait un homme. Mais la dignité humaine ne dépend pas de nos capacités. Une personne handicapée n’est pas moins humaine qu’une autre. L’homme est digne parce qu’il est homme. Une telle vision objective de la dignité s’oppose à une conception subjective de la dignité, laquelle conception subjective la fait immanquablement correspondre à une une utilité sociale. Une personne dépendante sur son lit n’aurait plus d’utilité sociale. Et en plus elle coûte cher. 

C’est aussi ce que souligne le pape François dans son message pour cette journée mondiale des malades : « Cette triste réalité est avant tout une conséquence de la culture de l’individualisme, qui exalte la performance à tout prix et cultive le mythe de l’efficacité, devenant indifférente et même impitoyable lorsque les personnes n’ont plus la force nécessaire pour suivre le rythme. Elle devient alors une culture du rejet, dans laquelle « les personnes ne sont plus perçues comme une valeur fondamentale à respecter et à protéger, surtout celles qui sont pauvres ou avec un handicap, si elles “ne servent pas encore” – comme les enfants à naître –, ou “ne servent plus” – comme les personnes âgées » (Enc. Fratelli tutti, n. 18). »

Chers paroissiens, je félicite ceux d’entre vous qui ont pu suivre la formation sur la bioéthique proposée par Alliance Vita, l’Université de la Vie, à Gap, Chorges et Briançon et je vous invite tous à l’auto-formation. Il est très important de nous former sur ces sujets, sinon nous nous laissons déformés par les pro euthanasie qui s’appuient sur des cas dramatiques pour nous faire évoluer et faire évoluer la loi. 

Mais la loi française n’a pas besoin d’être changée ; elle a besoin d’être connue et appliquée et d’y mettre des moyens financiers.

– Depuis 1999, la loi Kouchner garantit le droit pour tous au soulagement de la douleur et à des soins palliatifs. Mais elle n’est pas appliquée – notre département des Hautes-Alpes, bien fourni en soins palliatifs étant une exception heureuse. 

– Depuis 2005 la loi Léonetti donne aux malades un droit à l’arrêt des traitements pour éviter l’acharnement thérapeutique et prévoit une procédure collégiale en cas d’inconscience, en leur permettant de désigner une personne de confiance et de rédiger ses directives anticipées. Sachez que la CEF propose sur son site un modèle de directive anticipée respectant la foi chrétienne. Il est important pour chacun d’entre nous de rédiger des directives anticipées.

– Depuis 2016, la loi Claeys-Léonetti rappelle la possibilité de recourir à une sédation « profonde et continue » en phase terminale pour soulager le patient, au risque de hâter son décès. Même s’il y a un débat éthique sur cette sédation, la loi française maintient cette différence fondamentale en médecine entre ‘laisser mourir’ et ‘tuer’.

Robert Badinter, décédé cette semaine à 95 ans, a été interrogé en 2008 par une commission chargée d’évaluer l’application de la loi Léonetti. Il s’est vigoureusement élevé contre l’euthanasie : « Le droit à la vie, dit-il, est le premier des droits de tout être humain – c’est le fondement contemporain de l’abolition de la peine de mort – et je ne saurais en aucune manière me départir de ce principe ». « L’État a-t-il le pouvoir et le droit de dire : ’Puisque vous voulez mourir, je vais vous tuer’ ? » Au suicide assisté il répondait : « L’être humain est fragile. L’angoisse de mort est présente. Par moments, chez chacun, elle connaît une très forte intensité. Chez certains, face à une épreuve, il y a une tentation de mort qui est inhérente à la condition humaine. L’existence d’un service prêt à vous accueillir pour pour répondre à cette tentation me paraît présenter un risque d’incitation au suicide. » « Si on légalise l’exception d’euthanasie, vous aurez des zones d’ombre. Au sein d’une famille, certains diront : Non, grand-mère ne voulait pas mourir !, et d’autres : Si, elle m’a dit qu’elle voulait mourir ! » «Sur ce point, je ne changerai jamais. Nul ne peut retirer la vie à autrui dans une démocratie. » 

(https://www.lefigaro.fr/actualite-france/nul-ne-peut-retirer-la-vie-a-autrui-dans-une-democratie-quand-robert-badinter-s-opposait-a-l-euthanasie-20240209)

Le pape François, toujours dans son message pour cette journée s’adresse aux malades : « À vous qui vivez la maladie, qu’elle soit passagère ou chronique, je voudrais dire : n’ayez pas honte de votre désir de proximité et de tendresse ! Ne le cachez pas et ne pensez jamais que vous êtes un fardeau pour les autres. (…) Les malades, les fragiles, les pauvres sont au cœur de l’Église et doivent aussi être au centre de nos attentions humaines et de nos sollicitudes pastorales. (…) Confions-nous à la Très Sainte Vierge Marie, ND de Lourdes, Santé des malades, pour qu’elle intercède pour nous et nous aide à être des artisans de proximité et de relations fraternelles. Amen !


Directives anticipées proposées pour une personne de confession catholique

Les directives anticipées (DA) sont un instrument prévu par la loi pour que les souhaits d’une personne pour sa fin de vie soient respectés lorsqu’elle n’est plus en état de les exprimer.

Pour les chrétiens catholiques, c’est une opportunité pour réaffirmer leurs convictions et demander qu’elles soient respectées jusqu’au bout par l’équipe médicale.

En particulier, il est possible d’exprimer le refus de toute forme d’euthanasie, d’acharnement thérapeutique et de demander la présence d’un ministre du culte ou d’un aumônier pour la célébration des rites de la foi catholique.

(suite sur le site de la CEF : https://eglise.catholique.fr/sengager-dans-la-societe/eglise-et-bioethique/science-et-ethique/fin-de-vie-2/542219-directives-anticipees-proposees-pour-une-personne-de-confession-catholique/

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