A celle qui est avec nous – homélie Annonciation 8 avril 2024 Le Laus

Lundi 8 avril 2024 au Laus

Solennité de l’Annonciation – Journée des communautés éducatives de l’Enseignement Catholique des Hautes-Alpes

Ici à ND du Laus, je vais dire quelque chose qui peut sembler curieux : la fête de l’Annonciation n’est pas d’abord une fête mariale, mais une fête christologique. La liturgie ne se trompe pas en indiquant sur vos missels : ‘Annonciation du Seigneur’. Car l’annonce de la conception de Jésus, c’est à dire le commencement de sa vie humaine par laquelle il nous a apporté le Salut est une incroyable annonce ! C’est bien plus important que de savoir « comment cela se fera-t-il », selon la demande de la jeune fille vierge. Mais soyez rassurés sur ma théologie mariale ; sans le oui de Marie rien n’aurait été possible. C’est donc bien aussi une fête mariale.

La première lecture nous indique par la prophétie de l’Emmanuel, le pourquoi de cette Annonciation, la volonté de Salut du Père. La seconde lecture nous indique l’état d’esprit du Fils quand il s’incarne. Et nous terminerons par le Oui de Marie et ses implications pour nous.

La première lecture nous indique par la prophétie de l’Emmanuel, le pourquoi de la la volonté de Salut du Père.

Le roi Acaz, attaqué par son puissant voisin, est en difficulté militaire. Le Prophète lui conseille : « Demande pour toi un signe de la part du Seigneur ton Dieu. » Peureux, Acaz craint ce signe et se cache derrière l’argument : « Non, je ne mettrai pas le Seigneur à l’épreuve. » Alors Isaïe a cette réponse extraordinaire : « Écoutez, maison de David ! Il ne vous suffit donc pas de fatiguer les hommes : il faut encore que vous fatiguiez mon Dieu ! (Au passage, on peut donc fatiguer Dieu avec nos tergiversations, nos manques de confiances, c’est une façon de parler, mais oui, on peut blesser le coeur de Dieu.)

La fête de la Miséricorde hier dimanche nous a rappelé la surabondance de l’amour de Dieu malgré nos misères, et Isaïe fait la prophétie dite de l’Emmanuel : « C’est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe : Voici que la vierge est enceinte, elle enfantera un fils, qu’elle appellera Emmanuel, car Dieu est avec nous. » Toute la tradition juive l’a appliqué à l’attente du Messie et la tradition chrétienne à la venue de Jésus. Le pourquoi de l’Incarnation annoncée à Marie à l’Annonciation, c’est une volonté de Salut, de bonheur pour l’humanité, abîmée par un adversaire très fort, le tentateur, le satan, le diable, le diviseur. L’Annonciation est la réalisation de cette prophétie d’un Dieu avec nous, d’un Dieu homme parmi les hommes.

La seconde lecture nous indique l’état d’esprit du Fils quand il s’incarne.

L’auteur de la lettre aux hébreux nous indique qu’en entrant dans le monde, le Christ, le Fils de Dieu de toute éternité s’est adressé à son Père céleste en disant : « Tu n’as voulu ni sacrifice ni offrande, mais tu m’as formé un corps. Tu n’as pas agréé les holocaustes
ni les sacrifices pour le péché ; alors, j’ai dit : Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté. » Cette disponibilité, cette obéissance du Fils à la volonté d’amour du Père non seulement contrebalance la désobéissance d’Adam et Eve, mais produit déjà un effet en déteignant sur la jeune fille de Nazareth ! « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. »

C’est le Oui de Marie.

Puisque j’ai la joie de m’adresser à des professeurs et à toute la communauté éducative de l’Enseignement Catholique des Hautes-Alpes, et que votre enseignement fait d’abord appel aux capacités cognitives de vos élèves et à leur liberté, je voudrais relever 2 choses :

1/ Marie est troublée lorsqu’elle entends les paroles de l’ange: « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. » « À cette parole, nous dit st Luc, Marie fut toute bouleversée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. » Puis quand l’ange lui annonce qu’elle « va concevoir et enfanter un fils ; (…) il sera appelé Fils du Très-Haut (…) son règne n’aura pas de fin. », Marie interroge l’ange : « Comment cela va-t-il se faire, puisque je ne connais pas d’homme ? » Marie n’est pas une jeune fille superficielle, mais une personne réfléchie qui cherche à comprendre la signification profonde de la salutation de l’ange.

« La foi et la raison, a dit Jean-Paul II dans son encyclique qui porte ces deux mots, sont comme les deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité. C’est Dieu qui a mis au cœur de l’homme le désir de connaître la vérité et, au terme, de Le connaître lui-même afin que, Le connaissant et L’aimant, il puisse atteindre la pleine vérité sur lui-même. » Cela a une conséquence pratique pour Marie comme pour nous : la Révélation ne nous oblige pas à mettre notre intelligence sur pause. Au contraire, c’est avec notre intelligence que nous devons réfléchir sur notre foi. 

2/ Une seconde chose me semble important pour vous dans nos écoles et collège : le grand respect de Dieu pour Marie. Il ne force pas le sanctuaire inviolable de sa conscience. Il respecte infiniment sa liberté, parce que Dieu notre créateur sait que la liberté, qui va jusqu’à la possibilité pour l’homme de refuser l’amour de Dieu, est la pointe de la grandeur de sa création. 

Après avoir cité l’exemple de la vieille cousine Elisabeth, l’Ange Gabriel attend la réponse de Marie. Saint Bernard  ose interpeller à cet instant la Vierge Marie : « L’ange attend ta réponse : il est temps pour lui de retourner vers celui qui l’a envoyé. Nous aussi, nous attendons, ô Notre Dame.  » (Sermon sur les louanges de la Vierge Marie) Chers frères et soeurs, Marie aurait pu répondre ‘non’ dans sa liberté. Elle répondu ‘oui,’ avec une parole de confiance qui porte chacun de nos ‘oui’ : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. »

En cette fête de l’Annonciation, je vous invite à confier au Oui de Marie tous vos discernements.

Charles Peguy partage pourquoi parfois il préfère s’adresser à la Vierge Marie : 

Il y a des jours où les patrons et les saints ne suffisent pas.
Alors il faut prendre son courage à deux mains.
Et s’adresser directement à celle qui est au-dessus de tout.
Être hardi. Une fois.
S’adresser hardiment à celle qui est infiniment belle.

Parce qu’aussi elle est infiniment bonne.
À celle qui intercède.
La seule qui puisse parler de l’autorité d’une mère. (…)

À celle qui est Marie.
Parce qu’elle est pleine de grâce.
À celle qui est pleine de grâce.
Parce qu’elle est avec nous.
À celle qui est avec nous.
Parce que le Seigneur est avec elle.

(Le Porche du mystère de la deuxième vertu)

C’est l’occasion de vous annoncer qu’on va le faire prochainement, avec une neuvaine pour la paix sur le continent européen, que je vous invite à rejoindre du 1er au 9 mai prochain. Avec confiance nous nous adresserons « à celle qui est avec nous – parce que le Seigneur est avec elle. » Amen.