Extension de l’Incarnation – Expansion de la Résurrection – homélie Jeudi Saint

Jeudi Saint 28 mars 2024 en la Cathédrale de Gap

« Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. »

Aimer jusqu’au bout, voilà le rêve de notre vie ! Voilà aussi une belle définition de la messe par l’évangéliste St Jean. Il nous la donne dans son récit du lavement des pieds à l’occasion de la dernière Cène, situé à l’emplacement où les autres évangélistes racontent l’institution de l’Eucharistie. Un amour jusqu’au bout. En 2003, saint JPII dans son Encyclique sur l’Eucharistie intitulée : L’Eglise vit de l’Eucharistie écrivait : (9) « L’Eucharistie est ce que l’Église peut avoir de plus précieux dans sa marche au long de l’histoire » et (11) « Qu’est-ce que Jésus pouvait faire de plus pour nous? Dans l’Eucharistie, il nous montre vraiment un amour qui va « jusqu’au bout », un amour qui ne connaît pas de mesure. » Et cet amour il va jusqu’au bout de l’histoire de l’humanité, jusqu’à la fin des temps, en passant par nous. Car certes, le Seigneur Jésus nous a sauvés, il y a maintenant plus de 2000 ans, mais son Sacrifice sur la Croix est rendu actuel dans chaque Messe. Par la communion, nous recevons Jésus Ressuscité.

Le père Jules CHEVALIER, fondateur des missionnaires du Sacré-Coeur, et natif de la ville de Richelieu en Touraine, dont je fus le curé, explique que l’Eucharistie est « l’extension, un prolongement de l’Incarnation du Verbe en chacun des membres du corps mystique (CSJ214).

Le cardinal Robert COFFY, qui fut évêque de Gap de 1967 à 1974 avant de devenir archevêque d’Albi puis de Marseille disait qu’on peut certes souligner l’incarnation, comme vient de le faire le père Chevalier : DIEU se fait homme ! Mais il fut aussi mentionner l’aspect pascal de l’Eucharistie : l’homme devient Dieu ! Il voit « dans l’Eucharistie la Résurrection en expansion, l’invasion progressive de la gloire du Seigneur, le déchaînement de la vie dans un monde d’angoisse et d’ennui. »

Extension de l’Incarnation, expansion de la Résurrection, c’est tout cela la messe. C’est magnifique. 

D’autant plus magnifique que d’une part Jésus a choisi que cette extension de l’Incarnation et cette expansion de la Résurrection passe par la médiation d’un pauvre homme, un prêtre, qui en réponse à l’appel du Christ, à son tour, donne sa vie, pour aimer jusqu’au bout. Oui, cela vaut la peine de consacrer sa vie comme prêtre. Merci pour vos messages d’encouragement aux prêtres en ce Jeudi Saint. Peut-être que le Seigneur appelle certains jeunes de vos familles. C’est le plus beau cadeau que Dieu puisse vous faire ! Et si c’est vous-même qui entendez cet appel, n’hésitez pas à venir me voir ou votre curé.

Mais d’autre part, cette extension de l’Incarnation et cette expansion de la Résurrection ne peuvent se réaliser en nous sans notre participation pleine et entière. Vivre la Messe en profondeur, ce sera à la mesure de notre prière. En réalité, la qualité des chants ou de l’homélie de l’évêque ou du prêtre ne sont pas prioritaires, même s’ils sont importants.

En cette année de la prière, en préparation à l’année sainte 2025, je vous propose de reprendre des choses que vous connaissez, tellement elles semblent évidentes. La question est simple : Comment prier à la messe ?

Nous prions en pensant les paroles que nous chantons, en nous unissant aux paroles du prêtre, en parlant au Seigneur dans le secret de l’intime de nous-mêmes, en écoutant sa Parole dans les lectures. (relire les verbes souligés)

Nous prions chacun de nous et tous ensemble. 

Nous prions en communauté. Ainsi, par exemple le temps de la Prière Universelle, je me glisse dans la prière de l’Eglise, qui demain vendredi saint, sera très développée. Ainsi à l’occasion du geste de paix avec mes voisins, je signifie à la communauté le désir de mon coeur d’être un homme de paix, bienveillant, aimant. 

Ainsi lors de la grande prière du Notre-Père, l’un des trésors de notre foi, la prière enseignée par Jésus lui-même ;  c’est bien une prière communautaire. Je ne dis pas MON Père, mais NOTRE Père. Ainsi je me reconnais comme fils de Dieu et comme frère et tout homme.

Et nous prions individuellement à certains moments. 

Je vous invite certes à être conscient des paroles que nous disons, mais aussi à profiter des temps de silence, en particulier de deux temps de silence importants : 

1/ Premier temps de silence, après l’évangile et l’homélie, pour laisser descendre en nous telle ou telle parole qui aura touché notre coeur ou notre intelligence. Ce n’est pas encore le temps de sortir la pièce pour la quête !

La parole de Dieu pourra d’ailleurs plus pénétrer en moi si je ne la découvre pas au dernier moment, si je l’ai lu avant ou la veille au soir, au moins l’évangile.

2/ Second temps de silence, près avoir communié : nous remercions Jésus, dans le secret de notre cœur, d’être en nous et de nous avoir sauvés, et nous lui confions notre vie. Nous L’adorons, Lui qui est en nous. Si pour diverses raisons, nous ne pouvons communier, participer à la Messe sans communier mais en recevant la bénédiction est d’un même très grand profit spirituel.

Du temps de nos grands parents, ce moment de l’action de grâce se situait après la messe : chacun restait à sa place quelques minutes avant de sortir, et c’était très bien. Aujourd’hui; c’est aussi très bien, ce temps de l’action de grâce est placé juste après la communion. Cela nous permet de consacrer le temps après la messe à nous rencontrer plus longtemps les uns les autres. La sortie de messe fait partie de la messe, fait partie de notre vie communautaire !

J’insiste donc pour que nous gardions ces deux temps de silence assez long. 

Entre ces deux temps de silence, il y a plusieurs moments importants de prière personnelle : 

– A l’offertoire nous offrons intérieurement au Seigneur notre vie, nos joies et nos souffrances. La quête est aussi une offrande de nous-même et pas seulement un devoir de justice vis à vis de la paroisse.

– A la consécration quand le prêtre élève le Corps du Christ et le calice de son Sang, nous adorons Jésus réellement présent sous l’apparence du pain et du vin, il n’y a plus de pain, ni de vin mais Jésus Lui-même : Dieu !

Quand le prêtre dit : « Par Lui, avec Lui et en Lui…. » avant le Notre Père, nous offrons Jésus au Père.

Oui, Jésus nous donne tout dans l’Eucharistie, et cette Messe de la Dernière Cène nous le rappelle. Pour nous permettre d’y participer plus pleinement, de prendre place à sa table, il nous lave les pieds.

C’est au delà du signe de la charité, un signe de purification : « Le bain dans lequel il nous lave est son amour prêt à affronter la mort ; Seul l’amour a cette force purificatrice qui nous ôte notre impureté et nous élève à la hauteur de Dieu » commente un bibliste. (Magnificat – Compagnon de Carême 2024 page 112)

Pour participer en vérité, en plénitude à la Messe, il est nécessaire de se confesser régulièrement, et de venir à la Messe tous les dimanches ; calcul fait, cela ne fait qu’une heure sur les 168 que compte la semaine ! Manquer une Messe un dimanche, alors que nous aurions pu y venir, fait partie des péchés à confesser.

Pour conclure, voici une prière que St Thomas d’Aquin récitait avant de communier : 

« Ô Dieu plein de douceur, donnez-moi de si bien recevoir le Corps de votre Fils Unique, Notre Seigneur Jésus-Christ, ce corps charnel qu’il reçut de la Vierge Marie, que je mérite d’être incorporé à son Corps Mystique et compté parmi ses membres.

Ô Père plein d’amour, accordez-moi que ce Fils Bien-Aimé que je m’apprête à recevoir maintenant sous le voile qui convient à mon état de voyageur, je puisse un jour le contempler à visage découvert et pour l’éternité. »

Extension de l’Incarnation, expansion de la Résurrection, c’est tout cela la messe. Amen !

 

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