Pour que vous croyiez – Dimanche de la Miséricorde à Laragne

Dimanche de la Miséricorde 7 avril 2024

Eglise saint Martin de Laragne

Avouons le, Thomas n’a pas bonne réputation. Pourtant il est appelé saint Thomas ! « L’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu. Les autres disciples lui disaient : Nous avons vu le Seigneur ! »

Effectivement, les disciples étaient réfugiés à l’abri du Cénacle, craignant de suivre le même sort que Jésus. Celui-ci se présente à ses disciples et sa première parole est significative. Alors qu’il aurait pu leur faire un reproche de l’avoir abandonné et même renié, il dit « La paix soit avec vous ». Il ne blâme pas, il adresse un souhait de paix. C’est une des raisons pour laquelle saint Jean-Paul II a appelé ce dimanche après Pâques le dimanche de la Miséricorde. Jésus a montré un coeur miséricordieux ; un coeur, cordia en latin, qui accueille la misère des ses disciples. C’était pas folichon les disciples, entre le traitre, le renégat et le collecteur d’impôt qui volait… 

Réfléchissons sur la demande de Thomas : en fait, Thomas ne demande rien de plus que la grâce reçue par les autres ! « Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : La paix soit avec vous ! Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. » L’identité de Jésus ressuscité ce sont ses plaies, l’amour qu’elles signifient : Jésus est allé au bout de l’amour qui est de donner sa vie pour ses amis. Ses plaies sont restées ouvertes, en particulier le coeur. Médicalement certains l’expliquent car le coup de lance est arrivé après la mort  en Croix et le cadavre a figé la blessure. Mais plus important est le symbole du coeur ouvert ! Avec les prêtres et diacres du diocèse, lors d’un voyage pèlerinage que nous faisons tous les deux ans, nous avons cette année parcouru la Bourgogne et en particulier nous nous sommes arrêtés à Paray le Monial. Dans cette petite ville, au temps de Louis XIV, Jésus ressuscité est apparu à une contemplative de l’ordre de la Visitation, Ste Marguerite-Marie. En lui montrant son coeur, Il lui a dit : « Mon divin Cœur est si passionné d’amour pour les hommes, et pour toi en particulier, que ne pouvant plus contenir en lui-même les flammes de son ardente charité, il faut qu’il les répande par ton moyen, et qu’il se manifeste à eux pour les enrichir de ses précieux trésors que je te découvre. » (Autobiographie, § 53) 

L’expression la plus connue de cet amour se trouve dans la troisième grande apparition où Jésus dit : « Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes, qu’il n’a rien épargné jusqu’à s’épuiser et se consommer pour leur témoigner son amour. » (Autobiographie, § 92) Ces plaies, en particulier son coeur, sont des témoignages de son amour qui est allé jusqu’au bout et qui en retour nous demande de l’aimer. Car l’amour parfait ce n’est pas seulement « se donner », mais « s’aimer les uns les autres » ; c’est la réciprocité. Donc l’appel de Jésus c’est notre amour. Quand Jésus sur la croix s’est écrié « J’ai soif », c’était certes une soif physique, mais une soif de notre amour. 

Revenons à nouveau à Thomas, car il y a une seconde raison à sa sainteté. 8 jours plus tard, Jésus apparaît de nouveau et Thomas est présent. Jésus offre à nouveau sa paix. Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ;
avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »

Immédiatement Thomas sans peut-être même mettre la main dans les plaies lui fait une déclaration de foi : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » C’est en fait la profession de foi la plus simple et la plus profonde de tout l’évangile. Thomas reconnait la messianité de Jésus et sa divinité.

Jésus lui dit alors : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » La pédagogie dont a bénéficié Thomas tourne à notre avantage ! Ne soyons pas jaloux des apôtres qui ont vu le Christ ressuscité. La relation de foi est aussi profonde et belle ; c’est aussi une rencontre. C’est d’ailleurs ce sont témoignent les catéchumènes qui ont été baptisés à Pâques. Saint Jean poursuit son récit en en tirant une conclusion : « Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom. » Pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu. Voilà ce que produit la lecture de l’Evangile. Parfois un catéchumène a acheté un évangile, l’a lu et ensuite a demandé à être baptisé. La Parole est vivante. Elle est percutante. Vous avez sans doute repéré que l’évangéliste Jean utilise la même formule dans une lettre, notre seconde lecture : « Bien-aimés, celui qui croit que Jésus est le Christ, celui-là est né de Dieu. » Voilà le kerygme dont nous parle souvent le Pape, le coeur de la foi : Jésus est le Christ, il t’aime, il a donné sa vie pour toi et il te mendie ton amitié.

Et c’est ce kerygme que Jésus lui-même nous envoi proclamer à la suite des disciples quand il leur a dit : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » Et en plus de l’envoi il les équipe pourrait-on dire : « Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : Recevez l’Esprit Saint. » Nous sommes maintenant dans le temps pascal, jusqu’à la Pentecôte. Comme une immense retraite pour demander une effusion de l’Esprit sur chacun de nous, pour être renouvelé dans la foi, pour pouvoir dire comme Thomas : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »

Bien sûr cette foi n’est pas un vague sentiment, elle se concrétise dans notre vie. Et c’est bien ce que rappelle le récit des actes des apôtres, notre première lecture : « La multitude de ceux qui étaient devenus croyants avait un seul cœur et une seule âme. » Cette union fraternelle n’est pas à son tour théorique mais se manifeste d’une manière concrète : on mettait tout en commun. C’est bien ce qu’essaient de vivre les communautés religieuses, et je pense dans votre doyenné aux bénédictines de Rosans. Mais c’est aussi ce que nous essayons de vivre en paroisse et en diocèse, avec la quête et le denier, ainsi que les legs. La magnifique salle st Martin a pu être réalisée par un legs d’un habitant de la paroisse. Cette charité est en fait une victoire de la foi, car naturellement nous sommes portés à posséder et à mettre de côté car nous avons peur de manquer. Ce n’est pas forcément un péché, mais parfois ce peut l’être comme un manque de confiance en Dieu. Les premières communautés chrétiennes avaient une foi si forte qu’ils mettaient tout en commun. Donc nous avons deux témoignages pour annoncer le kerygme, le témoignage de notre foi et le témoignage de la charité fraternelle. Que l’Esprit Saint souffle toujours plus sur votre paroisse, que vous puissiez annoncer que Jésus est le Christ, votre Seigneur et votre Dieu. Amen !